Combate de negro e de cães
Un territoire d’inquiétude et de solitude, dans la nuit africaine.
Salvador la métissée, « la perle noire » du Brésil. Un passé colonial. Aujourd’hui, une société urbaine post-esclavagiste où les questions raciales prédominent dans tous les rapports sociaux.
D’un côté, Léone à Alboury: Alboury, est-ce donc parce que j’ai le malheur d’être blanche ? Pourtant, vous ne pouvez pas vous tromper sur moi, Alboury. Je ne suis pas vraiment une blanche, non.Oh moi, je suis déjà tant habituée à être ce qu’il ne faut pas être, il ne me coûte rien d’être nègre par-dessus tout cela. Si c’est pour cela, Alboury, ma blancheur, j’ai déjà craché dessus depuis longtemps, je l’ai jetée, je n’en veux pas. Alors si vous ne vouliez plus de moi… O noir, couleur de tous mes rêves couleur de mon amour ! Je le jure : lorsque tu rentreras chez toi, j’irais avec toi ; quand je te verrai dire : ma maison, je dirai :ma maison. A tes frères je dirai : frères, à ta mère : mère ! Ton village sera le mien, ta langue sera la mienne, ta terre sera ma terre, et jusque dans ton sommeil, je le jure, jusque dans ta mort, je te suivrai. De l’autre, Alboury à Horn : Il n’y a pas assez de place dans vos têtes et dans toutes vos poches pour y ranger tous vos mensonges.
Il s’agit de mettre en scène la lettre et l’esprit de Koltès. L’auteur procède par « plongée » dans la dérision de l’angoisse des quatre protagonistes. Comme à l’accoutumée, dans une partition minutieuse et précise, les êtres sont transfigurés par la splendeur poétique de l’écriture. La pièce – qui apparaît aujourd’hui comme visionnaire - est une tabula rasa, un théâtre à la force redoutable dans lequel le tragique, la dureté, la violence, se tressent avec la comédie. Ce qui sort de la bouche des acteurs, c’est comme « des cailloux à la manière de caillots de sang ». Koltès rivalise avec le monde. Il est fâché contre tous les corps sociaux, tous les pouvoirs. Sous les apparences du langage parlé, la langue de Koltès est plombée comme des vitraux d’une cathédrale.
Scène IV, Horn et Alboury
Alboury. – Moi, j’attends qu’on me rende [le corps de] mon frère ; c’est pour cela que je suis là.
Horn. – Enfin, expliquez-moi. Pourquoi tenez-vous tant à le récupérer ? Rappelez-moi le nom de cet homme ?
Alboury. – Nouofia, c’était son nom connu ; et il avait un nom secret.
Horn. – Enfin, son corps, que vous importe son corps ? C’est la première fois que je vois cela ; pourtant je croyais bien connaître les Africains, cette absence de valeur qu’ils donnent à la vie et à la mort. Je veux bien croire que vous soyez particulièrement sensible ; mais enfin, ce n’est pas l’amour, hein, qui vous rend si têtu ? C’est une affaire d’Européen, l’amour ?
Alboury. – Non, ce n’est pas l’amour.
Horn. – Je le savais, je le savais (…) Mais pourquoi alors êtes-vous si têtu pour une si petite chose, hein ? (…)
Alboury. – Souvent, les petites gens veulent une petite chose très simple ; mais cette petite chose, ils la veulent ; rien ne les détournera de leur idée ; et ils se feraient tuer pour elle ; et même quand on les aurait tués, même morts, ils la voudraient encore
Combate de negro e de cães (Combat de nègre de chiens) de Bernard-Marie Koltès
Première Création au Brésil
Spectacle en langue brésilienne
Nouvelle traduction : Angela Leite Lopes
Mise en scène
Avec
AC Costa (Cal), Carlos Betao (Horn), Marinho Goncalves (Alboury), Marita Ventura (Léone)
Collaboration artistique: Albertine M.Itela
Scénographie: Jean-Christophe Lanquetin
Son: Jean-François Domingues
Lumières: Stéphane Loirat
Costumes: Diana Moreira
Régisseur général et conduite son: Walter Bispo
Conduite lumières: Ismael Marques
Assistant scénographe: Rodrigo Frota et Fred Alvim
Assistant plateau: André Passos
Assistantes costumières: Amaryllis Nogueira, Dora Moreira, Leticia Maria et Lêda Sà
Maquillage: Luiz Santana
Assistant de production: Ismael Fagundes
Production exécutive: Mônica Koester
Chargée de production au Brésil: Luciana Vasconcelos
Chargé de production en France : Jean-Christophe Boissonnade
Coproduction Wor(l)ds…Cie, Alliance Fançaise de Salvador de Bahia, Oficina de Cultura avec les soutiens de Culturesfrance, Secrétariat à la culture de l’Etat de Bahia, dans le cadre l’année de la France au Brésil, França.Br 2009.
Remerciements aux Services Culturels du Consulat de France à Sao Paulo, François Koltès, Oumou Ba, Fernando Marinho, Cristina Vilanova, Police Militaire de l’Etat de Bahia, Sifa Longomba, Atelier de construction du Teatro Castro Alvez, Christophe Roy, Dimitry Ovtchinikoff, Jacques Peigné, Marie Raymond
Teatro molière/Alliance Française de Salvador de Bahia
du 21 août au 13 septembre 2009
Teatro Castro Alvez - Sala de Coro, Salvador de Bahia
du 6 au 22 novembre 2009
SESC, São Paulo, le 8 novembre 2009.
© Philiip Boulay Wor(l)ds... Cie. Website 2023